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Rencontres

Romain Ruth, président de Cosmébio : “Nous sommes en constante révolution”

Les salons de la cité universitaire internationale de Paris accueillaient le 25 juin dernier l’assemblée générale de Cosmébio. A cette occasion, les membres de l’association, qui défend la cosmétique bio depuis 2002, ont renouvelé leur confiance à son président Romain Ruth. L’ancien avocat pénaliste, aujourd’hui dirigeant de Florame, fait pour Petit Poudrier le bilan de son action et le tour des sujets d’actualité qui agitent le monde de la cosmétique biologique.

Comment voyez-vous le paysage de la cosmétique bio aujourd’hui ?

La cosmétique biologique est un mouvement qui a connu deux vagues. Une première à la suite de l’action des fondateurs de Cosmébio en 2002, avec la création de la cosmétique biologique. Il y a eu un réel engouement et une prise de conscience. Les consommateurs se sont vraiment aperçus qu’il y avait un problème avec certains ingrédients, au premier rang desquels le parabène. En 2005, cette première vague a popularisé la cosmétique biologique jusque dans les grandes surfaces : des marques connues se sont mises à faire du bio. Une fois cette vague arrivée, ceux qui n’étaient pas les pionniers de la cosmétique bio, pas les plus engagés, se sont aperçus que la rentabilité n’était pas forcément au rendez-vous. C’est là que la deuxième vague, assez puissante, est arrivée sous forme de refus. Lorsque je suis arrivé en 2010 au conseil d’administration de Cosmébio, ce refus ne s’était pas encore amorcé. En revanche quand j’ai été élu président en 2014, il l’était déjà un peu. Aujourd’hui, nous sommes vraiment dans cette deuxième vague.

Quel bilan tirez-vous de votre action à la tête de Cosmébio depuis votre arrivée en 2014 ?

Cosmébio s’est imposé comme l’organisme de référence. Nous avons mérité cette place, car nous avons été précurseurs sur certains sujets comme les microbilles de plastique ou la norme ISO 16128. Contrairement à ce que certains de nos adversaires de la cosmétique conventionnelle veulent faire croire, Cosmébio a apporté la démonstration que le label voulait vraiment dire quelque chose. Nous avons des choses à démontrer sur les ingrédients qui peuvent parfois poser problème et nous l’avons prouvé. Concrètement, la notoriété du label et de l’association a vraiment progressé ces trois dernières années. C’est une progression constante, je ne voudrais pas m’en attribuer les mérites, mais cette progression permanente du logo est un fait. Ensuite, j’ajouterais que nous avons prouvé notre capacité à ne pas être seulement des référents techniques, mais aussi des certificateurs. Cosmécert, au milieu d’Ecocert et de Qualité France est le seul intervenant associatif de la certification. Il a été le premier accrédité pour certifier selon la norme Cosmos. Nous avons gagné notre place d’interlocuteur de référence en ce qui concerne la cosmétique biologique et la cosmétique naturelle. C’est pour cela qu’aujourd’hui les pouvoirs publics nous consultent avant d’intervenir sur ces sujets. C’est une bonne chose, car nous ne sommes pas là pour défendre un pré-carré mais une cosmétique vraiment naturelle dans l’intérêt de tous.

photo Cosmébio

Quelles sont vos ambitions pour Cosmébio dans les prochaines années ?

A un moment où tout le monde se cherche un peu, nous avons intérêt à garder le cap. Notre cap, c’est celui d’une cosmétique qui ne cesse de progresser. Depuis le départ, nous sommes dans une démarche de progrès : notre référentiel progresse sans cesse, notre charte progresse sans cesse pour plus d’engagement éthique. L’ADN de Cosmébio est dans le mouvement. Il n’y aura pas de révolution, car nous sommes en constante révolution. Demain, il y aura beaucoup plus d’adhérents, y compris à l’international, puisque le référentiel Cosmos a désormais une vocation mondiale. L’objectif de Cosmébio est de continuer à populariser le référentiel, mais aussi à promouvoir une cosmétique d’excellence à la jonction entre l’agriculture biologique et l’industrie cosmétique. Dans les deux cas, sans être totalement chauvin, ce sont deux domaines d’excellence français.

Vous avez parlé lors de l’assemblé générale de Cosmébio de “cosmétique visionnaire”. Quelle est cette vision ?

Pendant quelques temps, on a accusé la cosmétique biologique d’être inefficace et d’avoir des textures et des odeurs déplaisantes. Aujourd’hui toute la cosmétique conventionnelle s’inspire directement de la cosmétique biologique. Qui aurait pensé, il y a 15 ans, que les sérums huileux, les huiles sèches seraient tendance ? Aujourd’hui les plus grandes marques parlent de vétiver, de gingembre, de cèdre ou de oud : elles revendiquent l’utilisation d’ingrédients naturels comme arguments marketing… À la différence des bases neutres de la cosmétique conventionnelle, on trouve dans la cosmétique biologique de vraies concentrations en matières naturelles et surtout, il n’y a plus de différence entre la base et l’actif : elle transforme la base en actif, et l’actif en concentré d’actif. Une cosmétique visionnaire, c’est une cosmétique qui est droite dans ses bottes depuis le début, transparente et sincère. C’est aller au bout d’une logique partagée par tout le monde aujourd’hui. La bataille théorique a été gagnée. Reste à mettre en pratique les engagements parfois un peu symboliques des marques de la cosmétique conventionnelle.

Le paysage se structure autour de plusieurs associations. Comment travaillez-vous avec les autres associations, comme Cosmed, la Febea ou encore les pôles de compétitivité comme la Cosmetic Valley ?

Désormais, Cosmébio est considérée comme l’une des plus grandes associations professionnelles. Il y a Cosmed, la Febea, la Cosmetic Valley … et pendant très longtemps Cosmébio était en dehors des spectres. On passait pour des doux rêveurs et pas nécessairement des techniciens. Aujourd’hui, nous avons fait nos preuves : l’association apporte des éléments techniques à ses adhérents. Si l’on demande aux professionnels du secteur quelle est l’association qui se met au service de ses adhérents, la première citée c’est Cosmed, la deuxième Cosmetic Valley et la troisième Cosmébio devant, par exemple, la Febea.

Avec Cosmed, il y a des sujets sur lesquels nous avons vraiment des convergences. Par exemple, sur la question de l’usage et de la réglementation des huiles essentielles. Nos domaines d’expertises se révèlent assez complémentaires : Cosmed s’est fondée autour des questions réglementaires, Cosmébio des questions scientifiques. Nous partageons des valeurs communes et pouvons échanger des compétences. Certaines de nos entreprises sont aussi adhérentes de la Cosmetic Valley ou de la Febea, ne serait-ce que pour les certifications titres à l’export. On se rencontre fréquemment. Pour nous, discuter avec les grandes organisations paraît évident. Aujourd’hui, il est impossible de faire sans. Beaucoup de grandes marques nous rejoignent. Je m’en réjouis et je veux faire en sorte que nos valeurs rayonnent : nous ne sommes pas sectaires.

photo Cosmébio

La part de marché de la cosmétique bio augmente, mais la bataille réglementaire reste âpre avec les tenants de la cosmétique conventionnelle. On l’a vu récemment avec la norme ISO 16128. Comment agissez-vous concrètement pour faire passer vos messages ?

Notre stratégie est de réaffirmer le label. Nous avons un cahier des charges strict, nous fixons des repères très clairs. Pour aller plus loin, nous ouvrons, par exemple notre assemblée générale au public. Nous fournissons des informations en permanence aux entreprises membres, et nous faisons en sorte qu’elles deviennent des relais d’opinion.

Pensez-vous avoir gagné la bataille de la norme ISO 16128 face à la cosmétique conventionnelle ?

C’est une victoire en demi-teinte. On ne voit pas la norme 16128 s’afficher sur les packs. De ce point de vue, il y a un recul évident. Ceux qui étaient les défenseurs de la première heure de cette initiative privée, totalement bidon, ont arrêté de la vanter. Ils se sont rendus compte que leur communication était contre-productive et l’ont stoppée. Cependant, cette norme permet quand même à certaines marques d’afficher des degrés de naturalité, des ingrédients naturels en se réfugiant derrière une norme ISO et un semblant de fondement juridique. Tout le monde doit rester vigilant. Nous n’hésiterons pas à dénoncer tout abus ou fraude.

Cosmébio est opposé à la disparition des allégations “sans” sur les cosmétiques. Pouvez-vous nous expliquer votre position ?

Nous considérons qu’il y une interprétation abusive et excessive de la seule vraie règle de droit qu’est le règlement européen. On le dit, on le rappelle : dans la loi, rien n’interdit le “sans”. C’est une contre-offensive de la cosmétique conventionnelle qui veut faire en sorte que l’on n’ait plus le droit de rien dire. Le règlement européen précise qu’il est interdit de dénigrer une substance autorisée par la loi. Dire sans sels d’aluminium, sans sulfates, sans parabènes n’est pas un dénigrement de l’ingrédient. Aujourd’hui beaucoup de marques ne se revendiquent plus sans parabène, car elles considèrent que le simple fait d’être certifiées Cosmébio doit suffire dans l’esprit de certains consommateurs à comprendre que l’on ne trouve pas de parabènes. Cependant, je ne vois pas pourquoi les marques bio seraient privées de cette liberté : elles doivent pouvoir le dire et beaucoup de consommateurs ont encore besoin de le savoir.


Les trophées Cosmébio 2019

Depuis 2014, les trophées Cosmébio récompensent chaque année les meilleurs produits cosmétiques naturels et bio.

Pour désigner les 6 vainqueurs – 2 par catégorie- un jury composé de professionnels, de consommateurs et d’influenceurs évalue la qualité des produits et l’engagement éthique de la marque (protection animale et environnementale, commerce équitable, insertion professionnelle et éducation).

À l’issu de l’assemblée générale 2019, les lauréats suivants ont été récompensés :

– Catégorie filière durable

Hydraflore – Huile de beauté
Estethica – Pure nature crème corps riche

– Catégorie environnement et biodiversité

Herbe et tradition – Baume souverain sommeil
Les Huilettes – Baume sos rescue

– Catégorie innovation

Toofruit – Intimousse
Boho green make up – Mascara jungle longueur

Les lauréats des trophées Cosmébio 2019

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